PAUL EST PARTI VERS SON AUTRE VIE

Quand je partirai, tu me mettras une petite croix blanche sur ma tombe, je l'ai fabriquée à l'avance avec du bois de palette de récupération, il faudra juste lui donner un coup de peinture. Tu ne me mettras pas de caillou sur le dos, j'ai assez porté comme cela dans ma vie et tu écriras seulement mon prénom et mon nom sans date ni de naissance ni de mort. Je serai juste venu et juste reparti. "Nos vaches sont jolies parce qu'elles mangent des fleurs" Albin Michel.

 

Paul Bedel une nuit de nouvelle lune, la lune qu'il aimait tant, probablement à l'étale de la marée comme il avait prédit est décédé ce 24 septembre 2018 en soirée, son coeur sur la terre ne bat plus au rythme du courant du Raz Blanchard, mais bat pour longtemps encore pour nous tous, ses orphelins qui avons tant aimé cet homme éternel, ce paysan du mot pays. 

Ce ne sont pas le nombre de champs qui font ta valeur de paysan, ce qui compte ce sont le nombre de kilos de vers de terre qui peuplent ton sol.

 

Pour connaître un homme même un peu il faut une vie. Pour connaître un champ c'est tout pareil.

 

Avant ma cataracte je n'y voyais plus, depuis que je suis opéré j'y vois trop je crois.

 

 

 

NOS VACHES SONT JOLIES PARCE QU'ELLES MANGENT DES FLEURS

Quand bientôt ma nouvelle vie va commencer, j’emmènerai peut-être avec moi la sensation de l’automne, cet espoir de la prochaine vie. L’automne quand tout meurt en apparence, les feuilles tombent et tout ça, les arbres se dessèchent, l’herbe change, elle se dessèche aussi, mais sa racine est prête à repartir, l’herbe ne meurt pas et la vie ne meurt pas. Elle meurt quand tu meurs mais sa racine est toujours là et la racine repoussera. Celle de Paul comme la tienne. La mort ressemble à l’automne, un brin d’herbe en automne" Paul Bedel.

PAUL BEDEL

http://www.albin-michel.fr/ouvrages/nos-vaches-sont-jolies-parce-qu-elles-mangent-des-fleurs-9782226397942

 

Ce 3 mai 2017, il est arrivé en plein muguet.

 

Nos vaches sont jolies parce qu'elles mangent des fleurs

 

 

 

Paysan, je vis et vieillis depuis 87 ans, sur une terre à cailloux, dans une presqu’île. Ca change beaucoup de choses d’être entouré par la mer. Chaque jour j’écris des morceaux de mon cerceau, sur de vieux agendas de récupération. Raconter ma vie, c’est pour moi un peu comme baratter mon beurre, le même baratin, sauf que c’est moins difficile pour les bras. Avec toi j’ai envie de parler des pierres, car des pierres, personne ne pense à parler pour elles. D’autres pensées me préoccupent, car pour moi les gens sont vivants, trop vivants aujourd’hui et notre terre devient morte. Je m’appelle Paul Bedel, je pensais que ma vie n’avait servi à rien, depuis dix ans, pourtant, il m’arrive une drôle d’aventure. J’écris ma terre, comment je l’ai soignée, sans engrais, ni pesticide et mes lecteurs me disent que j’ai bien fait pour elle. Depuis lors vous êtes des milliers de visiteurs, à qui j’ai ouvert la porte de ma petite ferme avec vue sur mer, phare et sémaphore. Vous me parlez de votre vie et je vous parle du trésor de comprendre ce qu’a été ma vie. Celui de ne rien vouloir du bonheur et de l’avoir rencontré quand même, en regardant mes vaches ne manger que de l’herbe et des fleurs.

LE 3 MAI 2017 EN LIBRAIRIE

Je sais bien que beaucoup de gens pensent que je suis un arriéré, parce que j'ai refusé le chimique pour et contre ma terre, j'ai refusé d'emprunter pour acheter une mécanique qui dans mes petits cllos aurait tout détruit. Aurait étouffé la terre. Je sais ce que l'on dit de moi, tant mieux, comme cela je peux me cacher dans ma cathédrale de verdure.

Et si Paul Bedel, paysan de la pointe de La Hague resté par choix à la traîne du progrès, vous racontait sa vie d'agriculteur mais aussi ses secrets ? S'il vous révélait ses « houoles », ses coins pour pêcher le homard ? S'il vous présentait ses vaches, Cabochue, « une vraie teigne », Échalotte, qui « sentait l'oignon » ou Copine, « toujours sympa avec tout le monde » ? S'il vous parlait « des choses qui n'arrivent qu'aux vivants », de ses coups de gueule, de ses coups de vie ? 
Avec le succès du livre Paul dans les pas du père et du film Paul dans sa vie, Paul Bedel est devenu le passeur d'un monde en voie de disparition. Chaque année, des centaines de personnes lui rendent visite pour l'entendre témoigner de ce choix de vie, celui d'une existence toute simple. Avec ce Testament, Paul Bedel vous invite vous aussi à boire une tasse de café accompagnée de petits-beurre, sur une table en bois patinée par les ans, et à l'écouter, lui et ses soeurs. En refermant ce livre, vous aurez le sentiment d'avoir rencontré un homme bon, serein et clairvoyant. L'impression de la terre, son silence et sa liberté. 

PREFACE DE CLAUDIE GALLAY

 

 

Je me souviens la première fois que j'ai vu le phare en arrivant par Auderville, la descente sur le petit port de Goury. Ce jour-là, les arbres étaient  balayés par le vent, ça sentait le sel, avant de voir la mer je savais qu'elle était là.

Et ce fut un choc.

Ce besoin ensuite de revenir.

Et de connaître l'histoire de cette terre. D'approcher les hommes qui la peuplent.

C'est une voix de cette terre que Catherine Ecole-Boivin nous offre d'entendre dans ce livre. Celle de Paul Bedel, agriculteur né à Auderville, village où il a grandi, vécu. Il est une des mémoires de la Hague.

Pour écrire ce livre, elle est allée recueillir ses paroles, répondant ainsi à la nécessité pour chacun de nous de ne pas perdre la trace de nos origines. Elle lui a rendu visite souvent. A capté ses mots, ses souvenirs.

J'ai voulu voir la pièce où avaient lieu leurs échanges. J'ai téléphoné à Paul et il a accepté de m'ouvrir sa porte. Je me suis retrouvée assise à la table dans la cuisine, à côté de la grande pendule, et il m'a raconté sa rencontre avec Catherine. Il m'a montré une chaise : Elle se mettait là, elle m'écoutait, elle avait un truc avec lequel elle enregistrait... 

Avec le temps, la confiance entre eux a grandi, il lui a prêté ses carnets.

Le livre s'est écrit, un livre confidence dans lequel chaque page nous dévoile les gestes minutieux d'un homme qui a travaillé la terre et s'en est nourri. Une vie de labours dans le respect du sol, car Paul Bedel a nourri ses vaches, il a fait pousser ses légumes sans jamais utiliser d'engrais chimiques. Seules les algues qu'il allait ramasser sur la grève. Il reconnaît en souriant que le rendement n'est pas le même...

Ce livre a le bon goût du beurre d'antan, des oeufs frais, des asperges, il sent la mer, le vent, les larmes aussi, celles que Paul Bedel a versées quand l'âge arrivant, il a dû se séparer de ses vaches.

Paul Bedel parle vrai, sans détour. Il s'interroge sur le monde, pose des questions essentielles, à quoi bon produire plus, posséder plus ? Avons-nous tant besoin ?  Dans ce livre, il nous parle du sol vivant, de la manière de l'aérer.  L'homme n'est pas donneur de leçons, il apporte juste son témoignage.

Il rit, raconte sans nostalgie le temps d'autrefois, l'enfance, la guerre, l'amour perdu. A la fois d'un autre temps et pourtant très contemporain, il avoue ne pas avoir besoin de ce qui s'achète, seulement de silence.

Paul Bedel a pratiqué la plus simple des agricultures. Lui qui s'est souvent fait traiter d'arriéré ne reste pas un jour sans recevoir de visites, des gens qui viennent de loin, font le détour par Auderville. Des élèves aussi, venus de lycées agricoles, qui se déplacent jusqu'à lui.

Tout au long de ces pages, Catherine Ecole-Boivin a su capter l'humour formidable de l'homme qui reconnaît être sans doute resté trop en arrière et gronde doucement que nous sommes peut-être allés trop loin.

Il se confie sans retenue, simplement, et d'un geste des mains nouées devant lui, il montre son coeur.

Le coeur, il dit que tout vient de là.

Cette façon de se taire aussi quand il s'agit de la Cogéma.

Les gens de la Hague s'adaptent tant bien que mal à la marche du monde. Paul Bedel fait de même.

Après avoir été agriculteur, l'homme devient passeur, transmetteur d'une mémoire vivante, celle d'un monde qui prend fin.

Son témoignage, au travers de la plume de Catherine Ecole-Boivin, nous interroge sur ce que nous étions et sur le sens que nous voulons donner à notre avenir.

De quoi tirer un sage enseignement et s'attacher un peu plus à cette terre de liberté si douce à mon coeur.

 

 

 

 

                                                     Claudie Gallay

 

QUI EST PAUL BEDEL ?


La vie de Paul Bedel, né en 1930 à Auderville près de La Hague, aurait pu passer inaperçue. Et pourtant, en mai 2006, il est le héros d’un documentaire de France 3 (Paul dans sa vie), devenu film de cinéma. Depuis lors sa popularité ne cesse d’augmenter, il a reçu plus de 10.000 visiteurs.

Cet agriculteur qui a repris l’exploitation modeste de ses parents n’a jamais succombé aux sirènes du modernisme. Longtemps considéré comme idiot, il apparaît aujourd’hui comme un sage, voire même un avant-gardiste ou un écologiste. Tout ça l’amuse, c’est qu’il a une grande lucidité et sait faire preuve d’autodérision.

Catherine Ecole-Boivin est aussi fille de La Hague, et c’est en août 2006 lors de la foire aux moutons de Jobourg que Paul vient vers elle. Il connaît son père mais aussi ses livres, en particulier Jeanne de Jobourg. C’est le début d’une belle amitié, elle conduit à ce livre qui nous conte la vie de Paul. L’écriture de Catherine Ecole-Boivin, s’apparente à celle de Giono, elle restitue les ambiances de ce coin de terre qui affronte la mer, l’univers de Paul qui par sa simplicité nous semble si « fabuleux ».

Didier Decoin (qui habite également cette région) a encouragé Catherine Ecole-Boivin à écrire ce livre et en a suivi la genèse, c’est donc tout naturellement qu’il en offre la préface.


PAUL ET SES SOEURS DANS LEUR FERME A AUDERVILLE

 

Françoise et Marie Jeanne